Les fosses profondes, incontournables en hiver

L’hiver, les silures profitent allègrement des opportunités que peuvent offrir les grands fonds. Ce sont des abris parfaits face aux courants souvent soutenus à cette époque de l’année. Ils offrent aussi une protection thermique relative, avec des températures d’eau plus clémentes qu’en surface, refroidie au contact de l’air. Ces grandes fosses dévoilent enfin des reliefs découpés sur des fonds propices à la tenue de grands bancs de poisson fourrage. Il est difficile d’indiquer arbitrairement une profondeur à partir de laquelle nous pouvons parler de fosse car cela dépend bien entendu de la profondeur moyenne du lit de la rivière ou du lac en question.

Il y a fosse et fosse

En Loire, par exemple, où la moyenne sur certains biefs est de l’ordre du mètre, un relief prolongé profond de 4 m peut être considéré comme une fosse. À l’opposé, dans un Rhône canalisé, ces 4 m tiennent plus du haut-fond que de la fosse qui, elle, peut aller jusqu’à 10 m et plus. C’est bien sûr à ce dernier type de spot que nous nous intéressons ici. Fort heureusement, même lorsque l’on débute, trouver ces fosses est l’une des recherches les plus faciles qui soit. En rivière, les piles de pont, les digues, les barrages (si autorisé) et épis artificiels sont des repères visuels verticaux extrêmement faciles à prendre.

Ouvrez l'oeil

En les approchant, observez en surface les mouvements de l’eau. Les rides, tourbillons, accélérations, contre-courants et autres remous sont des marqueurs de variations significatives du fond. Car bien souvent, à proximité de ces ouvrages se cache une fosse. Outre l’action mécanique de l’homme qui a pu creuser pour couler de lourdes fondations de béton, ces architectures modifient localement les débits et flux des courants présents qui vont à la longue creuser en profondeur le substrat. Les extérieurs de virage en épingle, sous l’action du courant, vont également se creuser et former naturellement de belles fosses. En lac de barrage, les ouvrages d’art restent des secteurs propices. Il est intéressant également de chercher l’ancien lit de la rivière, là où, bien souvent, se façonnent les secteurs les plus profonds. Pour cela, les anciennes images aériennes d’avant la mise en eau, ou les vues satellites à l’occasion d’une vidange, peuvent donner d’excellentes informations. Les cartes bathymétriques et les échosondeurs viendront bien sûr confirmer la présence de ces reliefs si recherchés. Pêcher une fosse profonde est assez particulier. Même en présence d’un faible courant, dans 10 m d’eau et plus, la pression de la colonne d’eau va impacter significativement le comportement de nos lignes de siluristes qui mettent en œuvre des éléments de forts diamètres. Et à cette période, l’activité des silures pouvant être réduite, trouver les poissons ne débouche pas nécessairement sur de super belles pêches.

Les montages

Lignes et actions doivent être adaptées à ces postes singuliers. Le courant ou les déplacements du bateau vont entraîner une pression de la colonne d’eau sur la ligne plus conséquente que par faible profondeur, modifiant la présentation du montage. Second effet délétère, cette pression peut engendrer des vibrations mécaniques et sonores de la ligne ou du bas de ligne. Des signes qui trahissent votre présence et qu’il faut donc éviter à tout prix. Pour cela, j’augmente significativement la masse de plomb. À l’ère où l’on ne cesse de vanter l’indispensable discrétion des montages, je croise toujours des regards dubitatifs, aux mises à l’eau, quand je montre les miens, équipés de lests pouvant aller jusqu’à 350-400 g !

Des plombs spécifiques

Dans ces grandes profondeurs, ce sont en effet des alliés précieux. Leur forme est également un paramètre majeur. Pour les plombs à soutenir, ils doivent être à la fois lourds et trapus en largeur afin d’avoir le moins de surface possible à opposer au courant. Je cherche également à ce qu’il présente une large surface plane parallèle à la surface de l’eau. Ce disque, en plomb ou en matière synthétique rigide, permet deux choses: la première, c’est de générer des flux d’eau intéressants quand j’anime mon montage, esché de gros vers de terre. La seconde, c’est de bien mieux renvoyer les ultrasons du sondeur et donc de bien le détecter à l’écran, malgré la grande profondeur, sans avoir à augmenter plus que nécessaire la sensibilité de l’appareil. Pour le mort-manié, j’apprécie les plombs de 200 g plus profilés, bon compromis entre bonne pénétration dans l’eau et belle présentation sur le fond. Les montures permettant de modifier le lest sans changer entièrement l’agrafe sont appréciables.

Affiner la ligne

Mais il n’y a pas que les montures qui opposent une résistance à la pression de la colonne d’eau. Le corps de ligne est impacté lui aussi. Dans ces profondeurs, j’ai banni les tresses à bas de ligne de très gros diamètres (100 à 150 kg). Si le contexte le permet, en restant raisonnable, je supprime cet intermédiaire et pêche en direct sur le corps de ligne. Dans le cas contraire, je réduis sa longueur au strict minimum et penche pour des résistances de 75 à 100 kg. Pour le corps de ligne, je bannis les diamètres au-delà du 50/100. Idéalement, je pars sur un 38/100 si l’environnement le permet. Avec de tels diamètres, il est évidemment hors de question de ferrer à la main, passer par la canne est obligatoire. Ces grands principes sont applicables quelle que soit la technique : verticale, leurre, flotteur.

Le dernière mètre

Au flotteur, toujours à cause de la profondeur, il est nécessaire que l’appât reste bien dans la couche d’eau désirée : avec des silures moins actifs qu’en eau chaude, la zone ciblée est clairement celle du dernier mètre. Dans ces conditions, je n’hésite pas à placer un lest tout près de l’appât, avec un bas de ligne très court. Une approche qui permet de traquer avec efficacité nos géants d’eau douce, au plus profond de leur tanière hivernale.