Vous l’aurez compris, il est possible de pêcher la même rivière tout en bénéficiant d’un dépaysement total en fonction des zones où nous nous rendons. J'avais eu un aperçu de ce fleuve mythique au niveau du confluent entre la Willamette River et la Columbia quand j’étais venu y pêcher l'esturgeon deux ans auparavant. Je l’avais simplement aperçu sans y tremper les lignes, mais je savais au fond de moi que ce n’était que partie remise et que si Dieu me donnait vie, je reviendrais probablement dans les années qui suivraient...
Plus de deux ans déjà
C’est au cours de l’année 2019 que ce voyage a pris forme. Je me suis organisé avec Olivier pour pouvoir préparer du mieux possible cette aventure. Comme lors de mon premier voyage, il fallut prendre des billets d’avion à l’avance pour bénéficier des prix les plus intéressants et bien organiser le matériel que je devais prendre. En l’occurrence un peu de tackle, et deux moulinets seront suffisants puisque Olivier me mettra à disposition le restant du matériel et normalement mes partenaires auront envoyé le matériel nécessaire à cette expédition, j’ai bien dit normalement (rire).
Après avoir passé les 10 heures de vol qui me séparaient de Portland, j’ai malheureusement constaté à mon arrivée que rien n'allait se passer comme prévu. En effet le matériel que j’étais censé recevoir n’est jamais arrivé à destination pour divers problèmes de transporteurs ... Et au lieu de commencer notre aventure, il a fallu trouver des lits de camp et tentes pour Kevin le cameraman de ZONE300 qui m’accompagnait ainsi que pour moi-même.
Le budget que j’avais à ma disposition étant limité et n’était pas prévu pour ceci à la base. Nous nous sommes tout de même adaptés du mieux qu’on a pu avec des tentes de premiers prix et des lits de camping très sommaires. Mais bon, cette petite épreuve n’allait pas gâcher le plaisir qu’on était venu chercher.
Portland
Une fois l’aspect logistique partiellement réglé, nous avons commencé à planifier les différents secteurs que nous allions visiter et bien sûr, je m’en suis remis à Olivier et je lui ai fait pleinement confiance sur l’organisation de ce séjour. Puisque nous avions pris du retard pour l’achat du matériel nous avons décidé de rester autour de Portland. Les deux premières journées nous avons pêché deux secteurs différents. Le premier qui se trouvait à quelques centaines de mètres de mon point d’arrivée, c’est-à-dire l’aéroport et le surlendemain sur un poste qu'Olivier connaissait dans la ville de Washington Oregon ... Ces deux premières journées se sont avérées très compliquées. Nous avons seulement capturé un seul petit poisson sur chacun des deux postes. Mais je n’étais pas pour autant inquiet, car nous devions nous rendre par la suite sur un secteur qu’Olivier pêche depuis plusieurs années à 4 heures de route de Portland et qui permet de capturer des poissons d’un gabarit plus intéressant et de façon plus régulière.
Un rêve éveillé
Le jour du départ arriva et ce qui fut intéressant dans ce voyage, c’est que nous étions sur une autoroute qui longe la rivière sur la quasi-totalité du parcours. Cela me permettait de découvrir pas mal de paysages différents à travers desquels s’étend la Columbia... Mon appareil photo n’arrêta pas de fonctionner tout au long du trajet ...
Une fois arrivés à destination en fin d’après-midi nous nous installâmes pour débuter la pêche et très rapidement Olivier captura ses premiers poissons. Nous nous étions partagés le poste en nous écartant d’une dizaine de mètres pour pêcher le bas d’une cassure avec deux cannes chacun. Je m’étais installé en amont et ne parvenait pas à déclencher de touche et je commençais à suspecter que les poissons étaient certainement interceptés par Olivier. Je songeais déjà à échanger de place avec Olivier le lendemain pour essayer moi aussi de capturer quelques communes américaines.
Ce jour-là Olivier captura plusieurs poissons tandis que ma première Étasunienne ne se fit prendre qu'à la tombée de la nuit... J’ai continué quelques heures de plus profitant qu’Olivier retire ses cannes pour tenter d’en capturer quelques-unes qui remonteraient plus simplement vers mon spot. Mais étant encore très fatigué par le voyage et le décalage horaire après quelques touches de petite communes, je décidais de ne pas replacer les cannes et de m’endormir paisiblement pour reprendre un peu de force pour le lendemain.
Method Feeder
Comme à mon habitude, je n’ai ouvert l’œil qu'au milieu de la matinée alors qu’Olivier avait déjà installé ses cannes au lever du jour. Donc c’était raté ! Je n’allais pas lui demander d'échanger les postes même si j’avais ce souhait intérieur, car j’appréhendais que le même schéma de la veille se produise, que les poissons remontant le courant pour s’alimenter soient interceptés sur la zone d'Olivier.
Mais contre toute attente elles décidèrent de s’alimenter pendant quelques heures sur mon spot. Pourtant, nous péchions la même distance, et comme nous utilisions la technique du method feeder nous n’avions pas trop le choix en termes de distance de lancer. Trop court les poissons ne venaient pas visiter les spots et trop loin le montage ne tenait pas sur le fond à cause du débit puissant de la Columbia... Le method feeder était composé de flocons d’avoine, de maïs doux mixé (cream corn) et d’un peu de farine de blé pour rendre le tout plus collant. En quelques heures, j’ai capturé cinq ou six poissons, rien de vraiment bien gros, mais cela suffit à me redonner confiance et à me donner le sourire. Mais je commençais à constater que ça serait pile ou face à chaque fois, soit les poissons s’alimenteraient sur mon spot soit sur celui d’Olivier. Nous n’arrivions pas à répartir les touches!... Il n’y avait que 10 mètres d’écart et pourtant soit c’était pour lui pendant quelques heures soit c’était pour moi...
Nous avons pêché ce poste pendant deux jours et nous avons capturé pas loin d’une vingtaine de poissons parmi lesquels quelques spécimens approchant les 13/14 kg qui nous ont donnés du fil à retordre. La puissance des poissons accompagnée par le débit du fleuve rendaient les combats très intéressants. En comparaison, je n’osais pas imaginer ce qu'une commune taillée en longueur de 18 ou 20 kg aurait pu nous offrir comme combat…Certainement un spectacle digne d'un octogone halieutique.
En aval de la Colombia
Mais le but de ce voyage était aussi de découvrir et bien que le poisson répondait présent sur ce secteur, nous avons décidé de nous éloigner un peu plus en aval de la Columbia à quelques kilomètres. Malheureusement, le secteur n’était pas aussi productif et les herbiers à la dérive nous empêchaient de pêcher correctement et nous perdions beaucoup de montages. Nous avons donc décidé de revenir sur le spot de départ pour finir la journée et ne partir sur une autre destination plus lointaine que le lendemain...
Après nous être reposés une nuit sur un Airbnb nous avons pris la route en direction du désert, sur les réserves des Indiens d'Amérique. Plusieurs territoires leur sont réservés. Après tout, c’est un continent qui leur appartenait avant l’arrivée des colons européens. On retrouve beaucoup de pontons artisanaux encastrés dans la roche sur les berges de la Columbia, qui permettent aux Amérindiens de pêcher le saumon avec leurs méthodes traditionnelles.
Le décor est unique ! Les montagnes rocheuses, le barrage hydroélectrique, le passage des navires… Olivier connaît un spot depuis peu sur lequel il parvient à capturer des carpes de façon régulière et nous avions décidé de terminer l’aventure carpe sur ce lieu. Car il était prévu de garder quelques jours pour pêcher le grand migrateur qu’est l’esturgeon blanc à la fin de cette aventure…
Contrairement à tous les postes précédents, il y avait sur ce secteur la possibilité de pêcher des zones différentes. J’ai décidé de jeter mon dévolu sur un bras mort qui contournait une petite île. Après l’avoir sondé depuis la berge, j’ai constaté une profondeur moyenne de sept mètres épargnée par le courant. J’espérais y trouver des carpes plus massives venues se mettre au calme. Olivier pêchait sur la partie exposée au courant et il réussit à capturer ses premières carpes très rapidement.
Beaucoup de petites communes finissaient dans l’épuisette d’Olivier cependant pour moi, ce fut calme tout au long de la journée. Ce n’est qu’au milieu de la nuit que j’obtins, mais première touche et que quelques communes légèrement plus corpulentes, rejoignirent le tapis. Au vu de ces premières 24 heures, je décidai de pêcher sur le bras mort uniquement la nuit et la journée je la passais aux côtés d’Olivier à capturer pas mal de poissons de façon alternée sur la partie principale de la Columbia.
Première fully
La nuit suivante Olivier s’absenta, car il avait un rendez-vous tôt le lendemain matin pour le travail. C’est alors que j’ai décidé de répartir ma zone de pêche en plaçant une canne sur la zone principale de la Columbia et deux cannes sur le bras mort. Plusieurs carpes communes du même gabarit se firent capturer au cours de la nuit. Cependant, au lever du jour, le bras mort m’offrit ma première « Fully ». Bien que de petite taille elle m’octroya beaucoup de satisfaction, car nous n’avions capturé que des carpes communes depuis le début. Ce type d’écaillures est rare sur cette partie de la rivière…
Pour donner suite à cela, nous sommes restés une journée supplémentaire avec à peu près les mêmes résultats que depuis le début de notre arrivée dans le désert. Nous avons repris la direction de Portland et les 48 heures restantes ont été consacrées à la pêche à l’esturgeon. J’ai d’ailleurs capturé un très beau spécimen qui fit un saut magnifique au cours du combat.
Ce voyage a été une fois de plus très enrichissant. La découverte de ces deux méthodes de pêche que ce soit la carpe au feeder ou l’esturgeon à la méthode surfcasting m’ont permis de sortir de mes réflexes habituels et de découvrir de nouveaux horizons… Il est vrai que la pêche à la carpe aux États-Unis est très marginale.
C’est un des rares territoires où tout est à découvrir. Que ce soient les fleuves ou les gigantesques lacs qui s’y trouvent, le mystère sur les cheptels de carpes qui les habitent est encore inexploré ce qui donne un goût plus raffiné aux aventures que l’on peut y vivre, et si le Covid n’avait pas interrompu mes projets, j’y serais certainement revenu dans l’espoir d’aller les traquer cette fois-ci sur les grands lacs en compagnie de mon grand frère de cœur Olivier Gandzadi.