Si le jour J reste celui de l’ouverture, il ne sera pas assez régulier pour multiplier les expériences et avoir suffisamment de résultats pour en tirer des conclusions fiables et reproduisibles. Je vais donc m’appuyer sur la pratique de la pêche en compétition afin d’essayer de définir une approche cohérente du jour J.
Crédit photo : Grégoire Juglaret
Redécouvrir la rivière
La pêche en compétition est régie par des règlements, et notamment celui de ne pas pêcher les jours, semaines ou mois (en fonction du type d’événement) précédents afin de ne pas mettre une pression trop importante sur le secteur concerné. De ce fait, on redécouvre, à chaque fois, une rivière « nouvelle », ou tout du moins une rivière dont les poissons ont évolué ou ont changé d’habitudes alimentaires. Il est donc nécessaire de la redécouvrir vite… voire très vite ! Qu’on ait déjà pêché le secteur ou non, il est nécessaire de le prospecter visuellement, celui-ci ayant peut-être évolué à la suite de divers phénomènes, depuis votre dernière sortie. Il faut ainsi découvrir le parcours qui vous est alloué durant le temps de la manche à venir, ce qu’on peut mettre en parallèle avec un parcours choisi lors d’une sortie de pêche de loisir. Avant même de monter sa, ou ses cannes, on enfilera notre wader et on longera l’ensemble du linéaire que nous souhaitons pêcher le jour J depuis la berge. Grâce à ce repérage, nous pourrons visualiser les différents faciès du parcours, les zones prometteuses et peut-être même de repérer un poisson ou de l’activité de surface.
Crédit photo : Grégoire Juglaret
Ce repérage permettra, une fois en action de pêche, d’accélérer ou de prendre son temps en fonction de la qualité de chacun des postes. Selon la saison, les paramètres de la rivière et les conditions de pêche évoluent considérablement. Température, oxygénation, ensoleillement… Autant de paramètres qui influent sur les poissons, leur métabolisme, leur alimentation… et donc de la manière de les pêcher. On cherchera à axer le maximum de temps de notre action de pêche sur les zones où l’activité des poissons sera la plus importante. Typiquement, en début de saison, on cherchera principalement les zones creuses, les courants plutôt lents, les gros amortis et les zones où les particules fines se déposent. Plus vous pêchez régulièrement un secteur, plus vous pouvez a l ler directement à l’essentiel tout en suivant l’évolution du comportement des poissons au quotidien. Mais si on considère que vous pêchez pour la première fois de la saison, ou si vous ne pêchez jamais deux fois le même parcours durant l’année, il est bon d’adapter une stratégie méthodique pour ne pas passer à côté des poissons.
Crédit photo : Grégoire Juglaret
Une journée avec un guide
Si vous n’avez que très peu de temps de pêche dans la saison, je vous recommande vivement de prendre une journée de guidage, avec un guide local, pour dégrossir le travail. Étant très régulièrement au bord de l’eau de sa rivière, il vous fera gagner du temps en ciblant tout de suite les bons secteurs, tous n’étant potentiellement pas actifs, et il vous dirigera également vers la bonne approche et vous orientera vers l’utilisation des mouches du moment.
Trouver le pattern
Il est bon de connaître ses points forts. Si vous avez une technique que vous affectionnez particulièrement, une mouche en laquelle vous avez une confiance toute particulière, c’est le moment de les associer ! C’est comme ça que vous pêcherez le mieux, car en pleine confiance ! Et c’est ainsi que vous allez repérer les postes les plus prometteurs. Une fois ces postes définis, vous allez pouvoir faire tourner les techniques et les mouches afin d’ajuster le menu jusqu’à tomber exactement sur celui du jour ! La prospection se fera, dans un contexte inconnu, parfaitement mécaniquement. C’est-àdire que durant un temps donné, une demi-heure, trois quarts d’heure ou une heure, on pêchera très lentement. On s’attardera à pêcher chaque poste très méthodiquement, en changeant plusieurs fois par poste de mouches ou d’approche. Il y a forcément une méthode qui obtiendra un bon résultat, c’est ce qu’on appelle le « pattern ». Une fois ce pattern défini, il ne vous restera plus qu’à le reproduire au fur et à mesure de votre progression dans la rivière, en ne ciblant que les bonnes zones, avec la mouche du jour, en gardant la bonne approche que vous aurez définie lors de ce moment d’observation et d’analyse de la partie de pêche du jour.
Crédit photo : Grégoire Juglaret
Matériel : deux choix possibles
Soit le choix de la polyvalence et de pêcher léger, avec une 10’ soie de 4 et un ou deux moulinets dans le dos du gilet vous permettant de changer de technique assez rapidement. Soit celui de partir avec deux cannes, une spécifique pour la sèche et une autre spécifique pour la pêche en nymphe. Aujourd’hui, c’est ce second cas qui prédomine en compétition afin de ne pas perdre la moindre minute possible en passant d’une technique à une autre, sans avoir besoin de démonter complètement un ensemble pour passer à un autre. Cependant, pour ne pas être pris au dépourvu, prévoyez, si vous le pouvez, un petit peu plus de matériel dans le coffre de votre voiture afin de ne pas passer à côté d’une technique qui pourrait être déterminante ce jour-là. Il n’est pas rare que la pêche en noyées soit redoutable, notamment en début de saison. Elle permettra de prospecter rapidement les zones homogènes et de trouver des poissons actifs sur une zone qui ne serait pas forcément bien lisible. Donc non seulement, elle permettra de prendre des poissons, mais également de bien les localiser afin de revenir dessus avec une technique plus lente et plus précise pour refaire le poste plus méthodiquement, d’abord en sèche, puis en nymphe. Pour ceci, une 10’ soie 5/6 montée avec une soie intermédiaire ou à pointe plongeante sera idéale. Elle vous permettra également de pêcher au streamer si l’activité des truites sur les insectes est sur « off »
Crédit photo : Grégoire Juglaret
La sélection des mouches
Pour gagner du temps, on fera une petite sélection sur un patch directement accessible sans aller fouiller dans ses boîtes à chaque changement de mouche. La phase observation est incontournable. Même si elle peut paraître comme une perte de temps, elle vous en fera gagner ! S’il y a une éclosion, c’est plus simple. En observant les imagos (insectes adultes), vous pourrez sélectionner une petite série de mouches dans vos boîtes qui s’apparentent à l’insecte adulte. Vous chargerez alors votre patch avec deux ou trois exemplaires de l’imitation de l’insecte observé en tenant compte de l’aspect global, de la taille et de la couleur dominante, et ce, dans tous les stades d’évolution de cet invertébré, car s’il se trouve en surface, il sera également présent en bonne quantité sur l’eau. Si aucun adulte n’est visible, il est temps de se mouiller ! Soulevez quelques pierres et observez les larves présentes. Pas besoin d’être docteur en entomologie et de connaître les noms des insectes en latin. Il vous suffit de repérer les espèces les plus présentes, de reconnaître s’il s’agit d’éphémères, de trichoptères ou de plécoptères, et de sélectionner dans vos boîtes les mouches qui se rapprocheront le plus des larves, nymphes ou pupes observées, toujours en matière de taille et de couleurs. Vous remplirez donc votre patch avec des nymphes correspondantes en veillant à les décliner en matière de masse, et en différentes couleurs de billes afin de coupler l’aspect imitatif avec l’aspect incitatif.
Crédit photo : Grégoire Juglaret
Un peu de fluo
En fonction de la lumière et de la pression de pêche sur le secteur, n’hésitez pas à avoir quelques mouches avec des éléments fluo (réagissant aux UV) dans la composition de vos mouches. Tag sur des sèches, épaulement ou tag sur des nymphes, ces matériaux peuvent parfois faire la différence lorsque la luminosité est faible ou que l’eau est légèrement turbide. N’hésitez donc pas à décliner vos mouches favorites en version fluo, elles vous serviront forcément à un moment ou à un autre. Tous ces aspects techniques sont importants à maîtriser pour parfaire sa journée de pêche. Mais il ne faut pas oublier que le plus fort technicien ne prendra jamais de poissons dans un « milieu vide ». Le jour de l’ouverture, ça peut être parfois le cas. Alors, avant tout, choisissez bien un milieu où les poissons seront probablement actifs une partie de la journée.
Crédit photo : Grégoire Juglaret
Secteurs ensoleillés
La rivière, les insectes et les poissons forment un système dans lequel les différents éléments sont interdépendants. Le métabolisme de la truite étant réduit par eaux froides, elle se tiendra dans ces conditions principalement sur des zones calmes et exposées au soleil. C’est également là d’où sortiront les insectes ayant ces mêmes besoins pour éclore. Toute la chaîne alimentaire se retrouve donc sur cette même zone, ce qui va concentrer l’activité et bien souvent trahir la présence des poissons.