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Portrait de Jérôme Piétri, le bluesman moucheur

Il est aussi bon bricoleur d’instruments de musique bizarres, comme sa guitare bidon d’huile, qu’il est un monteur de mouche doué

Crédit photo Thierry Millot
C’est l’histoire d’un personnage atypique, attachant, vivant à 100 à l’heure ses deux passions, la musique et la pêche à la mouche…

À plusieurs occasions, j’ai assisté à ses concerts survoltés dans la région de Clermont-Ferrand où il vit. Mais c’est à l’occasion d’un Salon de pêche à la mouche à Saint-Étienne que nous avons fait connaissance, sympathisé et par la suite effectué quelques virées de pêche ensemble. Jerôme est un fin pêcheur, un brin old school mais utilisant du matériel dernier cri. C’est un régal de le voir lancer avec un timing parfait, pour effectuer de longues dérives aval sur la Dordogne ou l’Allier, afin de leurrer un ombre gobant sur un grand radier. Il est aussi bon bricoleur d’instruments de musique bizarres, comme sa guitare bidon d’huile, qu’il est un monteur de mouche doué.

Notre bluesman fait un parallèle entre le timing pour le lancer de la mouche et le groove, l’assise, le tempo, pour la musique.
Crédit photo : Thierry Millot

Un sedge en sarcelle

En bon Auvergnat qu’il est, c’est sur la Sioule qu’un de ses amis lui fit découvrir la pêche à la mouche au début des années 1980. « C’est avec un sedge en sarcelle que je pris ma première fario à la mouche, ce fut une révélation ! » s’exclame-til. À cette époque, il était déjà musicien depuis une dizaine d’années, depuis il n’a eu de cesse de passer de la scène, avec ses guitares, aux rivières, avec ses cannes à mouche. Son parcours de musicien est des plus denses, après ses premiers groupes de rock, il joua de nombreuses années avec un groupe de bal pop/rock très connu dans le centre de la France. Il collabora ensuite sur scène et en studio quelques années avec Jean-Louis Murat et d’autres groupes locaux. Pendant une dizaine d’années, il parcourut les salles de concert de toute la France, Olympia inclus, avec un spectacle d’hommage à Pink Floyd. Puis, il y a une douzaine d’années, il a entrepris une carrière solo pour exprimer sa passion pour le blues et enregistré deux albums, Little Blues Story et Gone Fishing. Ses chansons, sa musique sont un melting-pot de textes grinçant contre le délabrement des sociétés, d’une nature abîmée et de clin d’œil à la pêche.

Musique et mouche

Lors de notre dernière partie de pêche, il me confia : « Dès que j’ai commencé à pratiquer la pêche à la mouche, je me suis aperçu rapidement que, outre le fait d’assouvir une passion, c’était excellent pour ma santé mentale et physique. De plus, dès mes premiers pas de moucheur, j’ai ressenti la similitude rythmique entre ces deux disciplines : le timing pour le lancer de la mouche, et le groove, l’assise, le tempo, pour la musique, les deux nécessitant une maîtrise technique minimale afin de pouvoir s’exprimer. Elles m’inspirent aussi l’humilité, car, dans ces deux domaines, plus on apprend, plus on s’aperçoit qu’on a encore à apprendre. Dans ma profession, j’ai toujours vécu à 100 à l’heure et j’avais beaucoup de mal à “fermer les tiroirs”, oublier le travail, pendant mes rares moments de loisir. Étant de surcroît d’un tempérament plutôt nerveux, j’ai réalisé rapidement que la pêche à la mouche était pour moi une sorte de yoga : il fallait que je sois concentré et en même temps détendu. Aujourd’hui, je considère même que c’est ma psychothérapie, qui me permet de rester relativement serein face aux diverses dérives du monde actuel. D’où, naturellement, j’ai commencé pêche à la mouche et musique avec mon avant-dernier album “Gone Fishing”, enregistré il y a déjà sept ans, dans lequel je dénonce les dérives qui conduisent à la destruction de la planète (en tant que moucheurs, depuis des années, nous sommes bien placés pour constater la disparition de nombreuses espèces d’éphémères, le manque d’eau, la pollution, etc.). » Dès qu’il le pouvait entre deux tournées de concert, il filait sur la Sioule, la Loue, le Doubs, puis en Slovénie et en Autriche. Il eut l’occasion de se mettre au brochet à la mouche, sur un étang privé du Cantal, dans les années 1990, pratique très confidentielle à cette époque. Il goûta aussi à la traque du saumon, en Irlande : « Avec une canne de 15 pieds, en Spey cast, et non point au “curedents”, comme nommaient les locaux pour désigner les 9 pieds des pêcheurs étrangers », ironise-t-il.

À plusieurs occasions, Thierry a assisté aux concerts survoltés de Jérôme Piétri dans la région de Clermont-Ferrand où il vit.
Crédit photo : Thierry Millot

Plaidoyer pour la planète

La pêche à la mouche en mer fut une grande révélation pour Jérôme il y a une dizaine d’années, lors d’un séjour aux Seychelles, grâce à son ami Roland Leymonie, patron du Domaine de Veirières, magnifique réservoir du Cantal. « Là, j’ai vraiment flashé, autant pour les poissons que pour le cadre et le contexte global. Pêcher dans une carte postale, avec des poissons offrant des combats de malade, dans une eau avoisinant les 28 degrés, c’est un changement de planète par rapport à la pêche de l’ombre que j’adore également. » C’est d’ailleurs après cette découverte qu’il saisit l’opportunité de vivre en Guadeloupe pendant quatre ans. Période pendant laquelle il mixa pêche des bonefish, permit et tarpon avec des concerts en « one man band » dans les clubs locaux.

Aux Seychelles, Jérôme a vraiment flashé, autant sur les poissons que sur le cadre et l’ambiance.
Crédit photo : DR

Depuis son retour des Antilles, bien qu’il ait un peu levé le pied pour profiter de sa retraite, il ne chôme pas puisqu’il donne régulièrement des concerts et a enregistré son dernier album, « Last Of The Fishing Days », cri d’alarme contre la destruction de la nature, et un réquisitoire contre la quête du profit par tous les moyens, qui conduit à cette situation. La pochette et le titre phare « Plastic Island » illustrent le fameux « septième continent », cette mer de plastique de trois fois la surface de la France, qui continue de s’agrandir, menaçant tout l’écosystème marin… Cela lui a valu d’être baptisé par certains chroniqueurs musicaux « le bluesman qui rock l’écologie ». Je terminerais par une de ses phrases fétiches : « Blues, Rock’n’Roll and Fly Fishing will never die ! »1

(1) Le blues, le rock’n’roll et la pêche à la mouche ne mourront jamais !

Ses albums « Last Of The Fishing Days » et « Gone Fishing » sont en vente chez : Amazon, Fnac, Leclerc.
Crédit photo : DR

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